Dans la foulée de la thématique de l’année, soit de vous raconter, à chaque mois, une anecdote ou un souvenir rattaché à mes expériences professionnelles, je me permets de vous raconter… un moment, en ce mois d’octobre.  

Ce moment s’appelle Epke Zonderland. Qui? Quoi? « Ça sort d’où ça? », vous dites-vous probablement. C’est que, voyez-vous, je suis convaincu que pour 99,9 % d’entre vous, ce nom vous éclaire autant que si je vous parlais en mandarin.

Le travail nous amène parfois à vivre des moments singuliers, spéciaux, des instants magiques et mémorables. 

Pour moi, Epke Zonderland est exactement ça. Reculons de quatre ans. Octobre 2018, Doha, au Qatar. J’anime les Championnats mondiaux de gymnastique artistique, pour une deuxième année de suite. L’année précédente, en octobre 2017, c’est au Stade olympique, à Montréal, que ça se passe.

2018, donc.

Nous sommes au Centre Aspire, à Doha. Un complexe sportif élite multifonctionnel dernier cri, lieu de cette importante compétition internationale regroupant les meilleurs gymnastes de la planète. Un nom est sur toutes les lèvres, Zonderland. Ce gymnaste des Pays-Bas est surnommé le Néerlandais volant, tellement il survole les appareils lors de ses numéros. Un surdoué, comme j’en aurai la preuve. Ma collègue et analyste, ancienne entraîneur de haut niveau, m’explique pourquoi je dois le surveiller et ne pas cligner des yeux lorsqu’il s’exécute, particulièrement à la barre horizontale.

Arrive ce moment tant attendu. C’est au tour de Zonderland de s’offrir en spectacle à la barre horizontale, la routine qui, potentiellement, fera de lui le médaillé d’or de ces championnats du monde. Et puis, c’est moi qui ai le privilège de l’annoncer, de le présenter à la foule et… à l’humanité (les réseaux de télé majeurs de la planète diffusent, sur place). Je m’exécute, je le présente. « Now stepping up to the horizontal bar, the 2012 olympic gold medalist, from the Netherlands, Epke Zonderland » (je suis là comme annonceur anglais).

L’annonce de son nom se perd dans le hurlement sourd de la foule partisane et conquise.

Et puis, l’activité sur les autres appareils ailleurs sur le plancher de l’amphithéâtre cesse (la compétition se déroule simultanément sur 5 ou 6 appareils). Tous veulent voir le phénomène Zonderland à l’œuvre.

La suite ne déçoit personne. J’assiste, aux premières loges, à une démonstration de force, d’agilité, de cohésion, de concentration et d’exécution sans bavure et d’un niveau dont je n’ai jamais été témoin auparavant, du moins pas en personne. Un 90 secondes de pur bonheur, éblouissement et extase devant tant de qualité. TOUT est plus! Zonderland est plus fort, survole plus haut, effectue ses manœuvres plus rapidement et il est plus précis que n’importe qui au monde. La barre travaille sans bon sens. Il est dans sa bulle, dans son monde. Mais il nous transporte dans son monde pendant ces 90 secondes. Il y a de quoi de magique de voir de si près la perfection, à ce niveau top-mondial.

J’ai beau vous le décrire, vous le raconter, jamais je ne pourrai vous le rendre avec justesse. Zonderland, ça ne se dit pas, ça se vit.

Voilà cet instant magique que me rappelle le mois d’octobre. 90 secondes d’évasion qui valent, à elles seules, le voyage et l’expérience! Ah oui… il a remporté la médaille d’or.

Christian Gauthier
Président et conseiller senior
G5 Communications